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lundi 6 janvier 2020

« Former des enseignants inclusifs
Perspectives comparatistes internationales »
Présentation
- Spirale 65-2 (2020) supplément au 65-1)

Sommaire Spirale 65-2
Cairn

Sommaire Spirale 65-1

Régis MALET
Cui BIAN

La prise en compte de la diversité dans les classes est à l’agenda de la plupart des pays développés, en Europe et au-delà (Commission Européenne, 2012 ; OCDE, 2010 ; UNESCO, 2009, 2012). L’inclusion ne concerne désormais plus seulement l’intégration des enfants ayant des besoins particuliers visibles dans les écoles et les classes ordinaires, mais de tous les enfants. De même que la diversité ne se conjugue plus seulement avec de seules minorités visibles, les élèves sont reconnus comme sujets à inclure dans l’ordinaire de l’espace scolaire, en termes de culture, de genre, de capacité, de catégorie sociale (Soysal, 2002).
Loin d’une limitation de l’éducation inclusive à l’éducation spéciale, de plus en plus de politiques, internationales et nationales, mais aussi de recherches sur l’équité et l’inclusion dans le champ de l’éducation scolaire (Prudhome et al., 2016 ; Waitoller & Artiles, 2013) approchent l’exclusion des élèves non en référence à un facteur unique et stigmatisant, mais à l’interaction de facteurs multiples qui doit faire l’objet d’une attention renouvelée en formation initiale et continue d’enseignants.
L’inclusion ordinaire, ainsi reconnue dans un sens extensif, concerne dès lors tout enfant ayant des capacités différentes, et exposé au risque d’échec scolaire, d’exclusion ou d’abandon en raison de caractéristiques personnelles, culturelles, sociales ou linguistiques (Majhanovitch & Malet, 2015). La dichotomie entre l’éducation spécialisée et l’éducation ordinaire s’est progressivement effacée dans de nombreux pays, le plus souvent sous l’effet de politiques supranationales (Commission Européenne, OCDE, UNESCO), adressant de fait de nouveaux défis pour la formation des enseignants : celui de préparer et accompagner des enseignants en capacité d’accompagner les élèves dans l’actualisation de leur potentiel propre d’apprentissage.
C’est dès lors la capacité de l’école et de ses enseignants à renforcer à la fois la différenciation, l’intégration et la cohésion sociale qui est interrogée, non seulement en principes, mais aussi en termes d’action publique, de dispositifs et de pratiques.
Cette approche à la fois plus globale et ordinaire de l’inclusion telle que promue par l’UNESCO (2013) entend contribuer à renforcer les compétences des enseignants grâce à une préparation ancrée dans la recherche et l’expérience pratique pour développer des attitudes positives à l’égard du potentiel des enfants issus de milieux divers. L’inclusion prend place dans un programme global de justice sociale soutenu par les politiques transnationales de promotion des droits des enfants (la Convention des Nations Unies sur les droits de l’enfant, 1989), jugées prioritaires par les grandes organisations internationales (Déclaration de l’UNES¬CO à Salamanque, 1994 ; UNESCO, 2009 ; OCDE, 2005 ; OMS, 2009).
Ce mouvement global promeut l’idée selon laquelle les enseignants ont vocation à devenir, au-delà de leur mission de transmission de savoirs et de biens culturels, des agents clés de changement dans le sens de l’inclusion et de la justice sociale, et doivent être équipés en conséquence d’une telle ambition, en particulier dans des contextes éducatifs et sociaux dans lesquels le lien social par l’école se délite et les inégalités sociales s’aggravent. Le défi pour la formation initiale des enseignants est désormais de doter les enseignants des aptitudes, capacités, connaissance et compétences propres à favoriser la mise en œuvre efficace des politiques d’éducation inclusive (Hattie, 2009 ; Graham & Scott, 2016 ; Philpot, Furey & Penny, 2010).
Dans ce contexte, et malgré une prise de conscience massive au niveau international de ce que la formation des enseignants est le levier nécessaire pour promouvoir en contexte scolaire l’éducation inclusive (Forlin & Chambers, 2011), les néo-enseignants apparaissent très insuffisamment préparés pour faire face à la diversité croissante des classes, et, faute de formation initiale et continue, peinent à s’adapter et à se développer professionnellement dans ce sens, pour le bien-être des élèves comme pour leur propre sentiment d’auto-efficacité (Bergugnat, Dugas & Malet, 2018 ; Donnelly, 2010 ; Hay, Smit & Paulsen, 2001).
Parallèlement, on constate que les recherches internationales et comparatives sur la préparation effective des enseignants à l’inclusion des élèves ne sont pas encore très développées (Sawhney, 2016). La raison peut en être que les pays développent des approches très distinctives de la justice et de l’inclusion scolaires, et de la formation des enseignants dans cette direction ; aussi bien, la faible mise en œuvre de dispositifs dédiés au soutien et à l’accompagnement professionnel en faveur de l’inclusion de tous les élèves peut expliquer l’état débutant de la littérature de recherche sur le sujet. De fait, bien que diverses politiques traitant de différents aspects de l’éducation pour l’inclusion se déploient, elles sont souvent discrètement mises en œuvre et paraissent assez déconnectées les unes des autres, n’étant pas reliées dans un vaste cadre d’intelligibilité de la formation des enseignants à une éducation inclusive (Englebrecht & Savolainen, 2014).
Beaucoup a déjà été écrit sur l’importance du contexte en éducation comparée (Alexander, 2000 ; Crossley 2009 ; Harris & Jones 2018 ; Wallenhorst 2017), y compris dans le domaine de l’éducation inclusive (Malet & Garnier 2020 ; Garnier, Derouet & Malet 2020 ; Bian & Malet 2017). Toutefois, peu d’études fournissent une analyse spécifique de l’influence des contextes en termes de formation d’enseignants inclusifs, de pratiques professionnelles et de formation locales. Peu de recherches ont étudié les processus d’apprentissage individuels et collectifs susceptibles de favoriser ou d’entraver l’inclusion scolaire dans différents contextes éducatifs (Tatto, 2011). La plupart sont des études de cas uniques ou des descriptions des politiques d’éducation pour l’inclusion scolaire ; de sorte que le lien entre les politiques et les dispositifs de formation et leurs effets croisés dans les contextes éducatifs est encore peu exploré (Naraian, 2014).
Les comparaisons internationales peuvent pourtant être instructives pour éclairer les continuités et discontinuités entre les actions priorisées et affichées par les politiques publiques, et les réalisations effectives en contextes scolaires. Ainsi aux États-Unis ou en Chine, il a été montré que la formation à l’inclusion scolaire pouvait être soutenue mais également entravée soit par des ressources et des obstacles contextuels, soit par des politiques, par des médiations institutionnelles ou organisationnelles (Naraian, 2014). Dans certains pays comme la France ou l’Ita¬lie, une focalisation disciplinaire encore dominante dans le cursus de formation initiale des enseignants peut limiter la formation à des compétences transversales néanmoins très affirmées en principes, même s’il existe dans ces pays une obsession coupable de la différence culturelle (Maritano 2002 ; Soysal & Szakács, 2012).
Dans d’autres pays qui sont travaillés par d’autre référents politico-admi-nistratifs, comme la Grande-Bretagne ou le Canada, l’inclusion de tous les apprenants par la différenciation est un objectif ancien et nourri depuis longtemps non seulement par des recommandations mais aussi par des évaluations (Department of Education, 2011). En France, les principes républicains s’opposent à toutes les formes d’intolérance et de discrimination à l’école. Cependant, ce modèle peut constituer un obstacle à la reconnaissance et à la gestion de la diversité culturelle, linguistique ou religieuse dans l’école française (Soysal & Szakács, 2012). Depuis 2013, les questions relatives à la diversité culturelle et sociale sont abordées dans le cadre de cours d’éducation à la citoyenneté et à l’éducation civique et reposent sur la transmission des valeurs républicaines, l’ouverture à l’autre et le respect des différences dont ne sont que peu interrogés les modalités de mise en œuvre et les effets en contextes scolaires.
À l’ère de la mondialisation, la diversité est devenue une composante de nos sociétés. Approcher les politiques éducatives et de formation des enseignants dans leur ambition affichée de promouvoir l’inclusion scolaire et la justice sociale invite à examiner les formes de reconnaissance et d’intégration des individus au regard de leurs caractéristiques, et de prise en charge par l’éducation publique de la diversité sociale et culturelle qui composent les sociétés. Ce dossier de Spirale – Revue de Recherches en éducation se propose d’apporter un regard international et comparatiste sur cette problématique, en interrogeant l’évolution des conceptions, politiques et dispositifs de formation des enseignants dans le sens d’une éducation inclusive.
La question posée est celle de la volonté et de la capacité des systèmes éducatifs à mobiliser et à former effectivement ses enseignants, en lien avec tous les acteurs de la communauté éducative, dans le sens effectif de l’inclusion scolaire de tous élèves et de la cohésion sociale dans les écoles publiques. Ce dossier, composé de deux volumes [1], entend proposer un état croisé des choix politiques, des pratiques et des dispositifs déployés dans différents contextes nationaux et locaux en matière de formation des enseignants à la diversité des élèves et dans le sens d’une intégration de tous dans les apprentissages.
Il est soutenu par des questions clés qui ont orienté les contributions de recherche ici rassemblées :
 Quelles conceptions locales de l’éducation inclusive et de la formation des enseignants dans cette direction ?
 Quelles continuités et discontinuités entre les politiques d’inclusion scolaire et les politiques, dispositifs et pratiques en formation d’enseignants inclusifs ?
 Quelles compétences inclusives visées des enseignants en formation initiale et continue et quelles ressources et modalités pour leurs mises en œuvre ?
 Quels contenus, quels déploiements curriculaires, quels soutiens et quels liens avec/entre les matières scolaires sur cette question ?
 Quelles croyances et attitudes des enseignants, qu’il s’agisse d’orienta-tions conceptuelles individuelles ou collectives, à l’égard de l’équité et de l’inclu-sion scolaire ?
 Quelle organisation du travail éducatif dans les établissements, quelles pratiques et quels ethos professionnels pour quelles missions inclusives des enseignants et éducateurs ?
 Quels liens entre les écoles, les centres de formation des enseignants et la communauté éducative élargie ?

L’ambition générale de ce dossier est de mieux comprendre comment une commune ambition d’inclusion scolaire, au-delà des mots d’ordre et de principes humanistes largement partagés, se déploie globalement, nationalement, régionalement et localement dans des politiques, des dispositifs et des pratiques de formation initiale et continue des enseignants, et avec quels effets. Ce numéro thématique de Spirale - Revue de Recherches en Éducation rassemble des contributions de chercheurs dans les domaines de l’inclusion scolaire et sociale et de la formation des enseignants intéressés par le croisement des regards et des contextes sur ces thèmes.

Les contributions rassemblées dans le second des deux volumes qui composent ce dossier, offrent une lecture de la formation des enseignants et de l’inclusion scolaire envisagée sous l’angle des pratiques enseignantes, des dispositifs éducatifs, des partenariats formatifs dans des espaces nationaux et des aires géoculturelles et territoriales variées. Ces contributions constituent autant d’analyses et de témoignages complémentaires des formes locales d’appropriation de la notion d’inclusion en éducation, des expériences menées en formation d’enseignants en milieu spécialisé ou ordinaire, des transformations institutionnelles, organisationnelles et des ajustements professionnels qu’elles produisent dans divers territoires et contextes socioéducatifs.
La contribution de Christine Berzin, Philippe Monchaux et Laure Ibernon expose tout d’abord les résultats d’une recherche visant à analyser les évolutions de la professionnalité enseignante en matière d’accueil des élèves en situation de handicap dans trois départements de la région Hauts-de-France. Appuyée sur les résultats d’une enquête par questionnaire comparée avec ceux d’une étude antérieure à l’instauration en 2005 de la scolarisation des élèves en situation de handicap, l’étude renseigne sur l’évolution des résistances à l’intégration conduite dans la même académie, révélant à la fois une évolution du droit à l’éducation pour tous mais aussi la persistance de criants besoins de formation des enseignants et un déficit d’articulation des interventions des différents partenaires.
Dalila Moussi et Christophe Luczak interrogent ensuite les conceptions et les pratiques de futurs professeurs des écoles ainsi que celles d’enseignants plus expérimentés sur la gestion de la diversité et l’hétérogénéité dans les classes. Dans une visée d’école inclusive non réduite à la prise en charge d’élèves en situation de handicap, les auteurs interrogent le sens à donner à une formation initiale des enseignants propre à accompagner et préparer au mieux les débutants dans cette ambition de reconnaissance et de gestion de la diversité. Les résultats d’une recherche menée sur les pratiques de la pédagogie différenciée sont exposés, pratiques reconstruites à partir de déclarations d’enseignants experts interrogés par des étudiants de Master MEEF dans le cadre de leur stage d’observation, et celles d’enseignants novices, fonctionnaires-stagiaires en Master 2, lors de leur stage en responsabilité.
Albina Khasanzyanova et Daniel Niclot s’intéressent ensuite aux enjeux et aux obstacles d’une collaboration pourtant jugée nécessaire entre l’école et des partenaires extérieurs pour lutter contre le décrochage scolaire et promouvoir l’in-clusion de tous les élèves. L’enquête menée auprès de professeurs des écoles stagiaires indique que les besoins de ces derniers en matière d’outillage pédagogique et professionnel pour réaliser ces objectifs d’éducation inclusive ne sont pas satisfaits par la formation initiale, tout particulier en matière de collaboration et de travail en partenariat. Les auteurs proposent des pistes de réflexion et d’action concernant la formation initiale et continue des enseignants dans le sens du développement de compétences et de pratiques collaboratives.
Xavière Brun, Caroline Hache et Caroline Ladage interrogent dans leur contribution les liens entre les pratiques numériques inclusives et la démarche et les représentations des enseignants vis-à-vis de la formation. Leur étude, fondée sur une vaste enquête nationale par questionnaire, a été réalisée auprès d’enseignants exerçant en milieu ordinaire dans les collèges publics nationaux. Les résultats montrent une corrélation entre les caractéristiques des formations et les gestes déclarés d’adaptation pédagogique et d’évaluation. La démarche volontaire est fortement corrélée à une variation de gestes, interrogeant l’influence de la motivation dans une démarche de professionnalisation, d’adaptation didactique et finalement de promotion de pratiques éducatives inclusives.
Dans sa contribution, Keyla Santana Painaud propose une étude des contradictions et des ambigüités dans lesquelles s’inscrivent la plupart des actions visant à la mise en œuvre d’une éducation inclusive au Brésil, pays qui a pourtant adhéré depuis trois décennies à de nombreux accords internationaux et affiché des principes et des politiques éducatives fondées sur la non-discrimination. L’enquête menée par l’auteure révèle cependant qu’au-delà d’un affichage de grands principes de justice et d’inclusion sociales par l’école, le développement du paradigme inclusif n’a pas abouti, bien au contraire, à une authentique démarche de lutte contre la non-discrimination, la ségrégation et la promotion de la diversité dans l’ordinaire scolaire.
Guillaume Escalié et Pascal Legrain explorent ensuite les conditions de mise en œuvre du modèle de l’apprentissage coopératif pour offrir une voie pédagogique crédible pour penser des environnements inclusifs d’apprentissage. La recherche exposée a consisté à accompagner les enseignants de CM2 d’un établissement scolaire dans la construction de dispositifs d’apprentissage coopératifs intégrant une tutelle entre pairs et à mesurer le potentiel inclusif de ce dispositif comparativement à une stratégie d’enseignement fondée sur l’instruction directe. L’étude montre que la condition coopérative d’apprentissage a généré une évolution significative des affects positifs et de la satisfaction du besoin de proximité sociale comparativement à la condition d’instruction directe, ce qui conduit les auteurs à souligner la nécessité de (re) penser une formation initiale et continue qui accompagne effectivement et dans des dispositifs adaptés et orientés les enseignants dans la mise en œuvre d’un enseignement inclusif soutenu par des dispositifs coopératifs d’apprentissage.
Anne Dizerbo présente une recherche inscrite dans la perspective anthropologique de la recherche biographique en éducation. Elle interroge la mise en œuvre de la politique inclusive au collège et au lycée à partir d’entretiens biographiques réalisés avec des enseignants de lettres, concernant le vécu de l’inclusion d’enfants présentant des troubles du spectre autistique. Son étude révèle différents facteurs influençant les pratiques des enseignants, freinant ou favorisant l’inclusion des élèves concernés. Ils révèlent également, à partir de la relation entre agir et identité professionnelle construite, les types de positions adoptées. Ces dernières permettent d’identifier les apports en matière de formation des enseignants afin de mieux accompagner la transformation des pratiques dans le sens de l’inclusion scolaire effective de tous élèves.
Nancy Gaudreau, Line Massé, Marie-France Nadeau, Claudia Verret, Vincent Bernier et Éric Frenette proposent ensuite une étude comparée du sentiment d’efficacité personnelle exprimée par des enseignants canadiens (province du Québec) et suisses (canton du Tessin) en matière de gestion de classe, et notamment en matière de gestion des comportements difficiles des élèves, aux niveaux préscolaire et primaire, à partir de variables sociodémographiques. Des relations sont observées et discutées en ce qui concerne l’expérience des enseignants et leur sentiment d’efficacité personnelle à gérer la classe. Les résultats révèlent des différences significatives selon le pays d’origine, le genre, mais aussi la formation initiale suivie et sa nature, au Québec comparativement à celle du Tessin. Les auteurs ouvrent des pistes de réflexion et d’action en termes de formation continue et d’accompagnement du développement professionnel des enseignants.
Dans leur contribution, Marie Andrys et Vanessa Lénérand interrogent également de façon comparative les conditions d’une éducation inclusive, relativement à la présence des adultes dans deux contextes socioéducatifs : le milieu de la petite enfance en Hauts de France et le secteur médico-social en Martinique, milieux à la fois proches et éloignés. Appuyée par un dispositif d’observation en situation à partir de l’activité des éducateurs, l’étude montre que la présence et l’action des éducateurs a une influence décisive sur l’inclusion des enfants, quelle que soit leur particularité, au sein des différents espaces de vie collectives. Elle montre aussi que la formation, l’accompagnement et les conditions de travail réel des éducateurs rendent possible ou obèrent les intentions affichées de promotion d’une éducation inclusive.
La contribution de Désiré Yamutuale explore les formes d’ajustement professionnel et pédagogique d’enseignants exerçant en immersion française au Canada – province de l’Ontario – et s’appuie sur une analyse critique du curriculum ontarien, des observations dans les classes des enseignants enquêtés, ainsi que les entretiens menés auprès d’eux. Dans un contexte ou l’éducation immersive est née d’une volonté politique de transformation du Canada en une société véritablement bilingue, les enseignants d’immersion française sont encouragés à développer des pratiques pédagogiques susceptibles de construire sur ces acquis culturels des élèves pluriethniques dans leurs salles de classe. La recherche rend compte des tensions auxquels ces grands principes éducatifs fondés sur l’inclusion linguistique et ethnoculturelle invitent les enseignants à des ajustements professionnels complexes.
Lucie Mougenot propose dans sa contribution d’approcher la question de l’inclusion scolaire par le prisme des relations socioaffectives entre les élèves et d’étudier leur impact sur les interactions. Appuyée sur deux enquêtes menées en classe d’éducation physique et sportive (EPS), l’auteur montre en quoi l’outil sociométrique (Moreno, 1970) peut être employé de façon pertinente par les enseignants pour cartographier les réseaux affinitaires au sein d’une classe et identifier les élèves exclus ou ignorés afin d’y apporter une attention particulière et favoriser leur inclusion scolaire, en particulier dans des pratiques de coopération.
Enfin, Pascale Prax-Dubois expose une recherche comparative menée sur cinq années et conduite dans deux classes préélémentaires et deux classes élémentaires en REP+, à La Réunion. S’inscrivant dans le champ de l’étude didactique des langues et du plurilinguisme, l’étude étudie comment les enseignants forgent leurs convictions linguistiques éducatives et mettent en place une didactique personnelle à partir d’un questionnement variant selon les contextes. Elle montre également l’impact positif de la collaboration de l’école avec son environnement sur la déconstruction des mécanismes de reproduction des inégalités sociales. L’article conclut sur la priorité d’accompagner l’autoformation et le développement professionnel des enseignants en les initiant à la recherche ethnographique et à la conscience critique du langage, dans le cadre d’une recherche-action participative ayant pour finalité la construction d’une culture langagière commune, que l’auteure nous invite à resituer au sein d’une éducation aux principes démocratiques et à la diversité.

Régis MALET
Institut Universitaire de France, Université de Bordeaux
Laboratoire Cultures, Éducation, Sociétés (LACES EA7437)
Cui BIAN
Université Normale de Shanghai
Institut de recherche en éducation comparée et internationale

Bibliographie

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Spirale - Revue de Recherches en Éducation – 2020 N° 65-2 (3-11)


[1Le premier volume, 65-1, sera imprimé pour les abonnés  ; le second, 65-2, supplément hors abonnement, sera imprimé à la demande. Les 2 volumes seront accessibles sur Cairn.