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dimanche 19 décembre 2010

Appel à contributions
Spirale
68 (octobre 2021)
Rôle des femmes en faveur de l’Éducation nouvelle en France et en Europe au XXè siècle

Coordination

Laurent GUTIERREZ

Université de Paris Nanterre

L’Éducation « nouvelle » entretient, dans le champ lexical, l’idée selon laquelle la modernité en éducation s’érige, à un moment de son histoire, en opposition déclarée à ce qui apparaît, soudainement, comme dépasé (Hameline, 2000). Celui qui adhère à cette idée doit, par ailleurs, être en mesure de situer précisément l’avènement de cette modernité éducative au risque de compromettre la légitimité de son propos. Dans le cas de l’étude historique de l’« Éducation nouvelle », il est, ainsi, relativement aisé de constater les difficultés, pour ne pas dire les limites, d’une telle entreprise. Sur le plan philosophique, si la paternité de l’éducation nouvelle revient, à l’unanimité, à Jean-Jacques Rousseau, d’autres précurseurs sont évoqués, ici et là, dans l’ombre du citoyen de Genève (Gal, 1966 ; Foulquié, 1948 ; Faure, 1946 ; Louis Raillon, 2004). Auteur controversé malgré l’indéniable portée de ses idées sur l’éducation des enfants (Compayré, 1885), Rousseau devient, dès la fin du XIXe siècle, une référence dont il convient de préciser les aspirations sur le plan scientifique. Edouard Claparède, qui perçoit les limites sémantiques de l’expression « éducation nouvelle », propose le paradigme d’« Éducation fonctionnelle », enrichissant ainsi un arsenal conceptuel en faveur d’une révolution copernicienne en pédagogie (Ottavi, 2005) qu’il appelle de ses vœux.
À certains égards, la fin du XIXe siècle prépare ce qui sera le « siècle de l’enfant » (Key, 1900). L’effer-vescence repérée autour des syntagmes « Éducation nouvelle » et « école nouvelle » s’inscrit dans un ensemble d’initiatives dont l’institution scolaire n’est pas hermétique (Pécaut, 1882). Bien au contraire, la question péda-gogique est l’une des principales préoccupations du législateur au moment où il s’agit de former les hussards noirs de la République (Kahn, 2004). C’est d’ailleurs dans cette perspective qu’est lancée la Revue Pédagogique dès 1878, avant même le vote des lois scolaires au Parlement. Les principaux ténors de la pensée pédagogique de l’école publique française (Ferdinand Buisson, Gabriel Compayré, Henri Marion, Charles Chabot, etc.) publient à cette même époque des ouvrages qui frappent encore les esprits par l’actualité de leurs propos. Leur engagement à la cause éducative se prolonge par leur action au sein d’associations pédagogiques voire à des sociétés savantes qui tentent de renouveler l’enseignement officiel.
À l’image de la plupart des organisations sociales nées au début du XXe siècle en France, la présidence de ces associations pédagogiques furent confiées à des hommes. En réaction, les femmes fondèrent leur propre organisation au sein desquelles elles occupèrent les mêmes fonctions. Si cette répartition permit aux deux sexes d’obtenir des titres équivalents, elle entérina de fait une dichotomie entre deux mondes : celui d’une pédagogie pensée par des hommes et celui d’une pédagogie conçue par des femmes. Certes, les frontières entre ces deux territoires ne furent pas toujours hermétiques. L’un et l’autre accueillait, à l’occasion de certains événements, des interventions de l’autre sexe dans le cadre de ses activités comme le laisse apparaître l’étude de leurs périodiques respectifs. Force est toutefois d’admettre que le champ de la réflexion pédagogique fut l’objet d’une certaine répartition sexuée en fonction des lieux, des thèmes, des disciplines et des niveaux d’enseignement où elle pouvait constituer un enjeu.
Les organisations pédagogiques se réclamant du mouvement de l’éducation nouvelle semblent avoir dé-rogé à cette règle. Cette singularité permit aux femmes d’occuper des fonctions d’administratrices au sein de ces structures. Nous pourrions en déduire, a contrario, que ces espaces n’attirent pas ou peu les hommes. Or, il n’en est rien. Les questions d’éducation et de pédagogie ont mobilisé bon nombre d’intellectuels et d’hommes politiques qui y voyaient le moyen d’indiquer le chemin vers une réforme globale de leur pays. Certaines personnali-tés de notoriété publique comme Paul Langevin ou Jean Zay, convaincus que les évolutions sociétales passaient par la révision des méthodes d’enseignement, se sont mobilisés en faveur de ces mouvements.
Dès lors, plusieurs questions se posent : comment se sont répartis ces postes à responsabilités ? Au sein de quelles associations ? Quelles fonctions ont occupé ces militantes de l’éducation nouvelle ? Quels étaient leur statut lors de leur accession à ces postes ? Quels furent leurs soutiens ? Quelle conséquence cela a-t-il eu sur leur carrière administrative ? Dans quels réseaux évoluaient-elles ? Quel rôle jouèrent-elles une fois élue ? etc.
Dans le cadre de ce numéro thématique de la revue Spirale, nous chercherons à comprendre la place et le rôle des femmes dans les associations pédagogiques se réclamant du mouvement de l’éducation nouvelle au cours du XXe siècle. Nous accorderons une attention toute particulière aux initiatives de cette nature dans des espaces géographiques dépassant nos frontières hexagonales.

Quatre axes sont proposés à la réflexion :

1. Rôles et fonctions au sein des associations
La place et le rôle des femmes au sein des associations d’éducation nouvelle en France et ailleurs en Eu-rope n’a pas fait l’objet d’études qui permettent d’en circonscrire avec précision les contours. Or, à bien des égards, leur action semble avoir été décisive. Que l’on songe à l’organisation de grands événements ou à la préparation des diverses rencontres qui jalonnent l’existence de ces organisations au sein desquelles elles prirent une part active, force est de constater que le nom de ces femmes est souvent relégué au second plan. Cantonnées, à quelques exceptions près, aux fonctions de secrétariat et/ou de trésorière, nous souhaitons questionner le parcours de ces femmes qui devinrent les véritables chevilles ouvrières des associations représentatives de ce mou-vement en faveur de l’éducation nouvelle.

2. Diffusion et militantisme pédagogique
Il s’agit, là encore, d’un aspect laissé de côté par la majorité des historiens de l’éducation. Nous souhaiterions profiter de cet appel à contributions pour accueillir des travaux sur l’identité de ces militantes de l’éducation nouvelle qui ont œuvré à la diffusion de ces idées et de ces pratiques à travers leurs ouvrages et/ou leurs articles dans la presse pédagogique. Exerçant en dehors de l’institution scolaire, le plus souvent dans des écoles privées, ces éducatrices ont joué un rôle non négligeable aussi bien dans la création de filiales locales (forme de relai/prolongement des initiatives nationales) que dans la mise en pratique des idées pédagogiques dans leur classe. Les comptes rendus d’expériences constituent, ici, des éléments importants susceptibles d’alimenter cette entrée.

3. Initiatives au sein de l’institution scolaire
De statut différent (directrice d’école, institutrice, inspectrice, directrice d’école normale, professeur dans l’enseignement secondaire), ces femmes, fonctionnaires de l’Éducation nationale pour ce qui est de la France, ont participé à la diffusion des idées et des pratiques pédagogiques de l’éducation nouvelle. Nous nous inté-resserons, en plus des actions menées, à la manière dont elles s’y sont employées au sein de l’institution scolaire d’État. Nous analyserons également les éventuels effets de leur engagement en faveur d’une éducation nouvelle confrontée aux tenants de l’enseignement traditionnel. Nous chercherons ainsi à comprendre leur motivation et la portée de leurs actes dans des contextes qui ne leur fut pas toujours favorable.

4. Relais et promotion dans les organisations d’éducation populaire
Nombreuses sont les associations d’éducation populaire où l’action des femmes en faveur de la promo-tion des idées et des pratiques pédagogiques issues de l’éducation nouvelle a été importante. Après la Seconde Guerre mondiale, ces éducatrices se sont souvent spécialisées dans certains secteurs des loisirs où elles ont eu à cœur d’élaborer/d’adapter puis de transmettre des techniques inspirées de l’éducation nouvelle. Ce projet éditorial est l’occasion de repérer ces instructrices/formatrices en charge de la formation des animateurs/trices qui ont, ensuite, fait vivre ces procédés avec les enfants et des adolescents. Cette entrée sera, enfin, l’occasion d’interro-ger la permanence de ces essais dans un contexte et un environnement singuliers où l’on retrouve bon nombre d’enseignants.

Bibliographie

Compayré G. (1885) Histoire critique des doctrines de l’éducation en France depuis le XVIe siècle. Tome II. Paris : Hachette.
Foulquié P. (1948) Les écoles nouvelles. Paris : PUF.
Gal R. (1966) « Signification historique de l’Éducation nouvelle » – in : G. Mialaret (éd.) Éducation nouvelle et monde moderne (28-54). Paris : PU de Grenoble.
Hameline D. (2000) Courants et contre-courants dans la pédagogie contemporaine. Paris : ESF.
Hofstetter R., Go H.-L. & Riondet X. (dir.) (2018) Les acteurs de l’Éducation nouvelle au XXe siècle. Grenoble : PU de Grenoble.
Kahn P. (2004) L’instituteur et le philosophe. Essai sur la construction et le sens du discours pédagogique de l’école républicaine, 1878-1914. Habilitation à diriger des recherches, Université Paris 5 Descartes.
Key H. (1910) Le siècle de l’enfant. Paris : Flammarion.
Ottavi D. (2004) « La « révolution copernicienne » de la pédagogie » – Le Télémaque II, 28 (19-24).
Pécaut F. (1882) « De l’usage et de l’abus de la pédagogie » – Revue Pédagogique 2 (97-110).
Raillon L. (2004) « L’Éducation nouvelle a-t-elle existé ? » – in : A. Ohayon, D. Ottavi et A. Savoye (éds.) L’Éducation nouvelle, histoire, présence et devenir (317-326). Berne : Peter Lang.

Calendrier et consignes aux auteurs

Décembre 2019 : Appel à contributions
15 mars 2020 : Réception des projets d’articles (voir ci-dessous)
1er avril 2020 : Sélection des propositions de contribution et réponse aux auteurs
1er septembre 2020 : Livraison des articles
Septembre-Novembre 2020 : Double expertise des textes
Décembre 2020 – Mars 2021 : Navettes entre les auteurs, le directeur du numéro et les experts
Mai 2021 : Livraison du dossier (articles dans leurs versions définitives accompagnés de l’introduction).

Nous attendons pour le 15 mars 2020 un résumé d’une page présentant le projet d’article envisagé, où les auteurs indiqueront une problématique générale et le questionnement qui en découle sans omettre de préciser le numéro de l’axe dans lequel ils s’inscrivent. Enfin, une liste des références bibliographiques accompagnées des sources archivistiques mobilisées dans le cadre de l’étude entreprise seront jointes au résumé.

Vous veillerez à y indiquer également :
 vos noms, prénoms
 votre institution
 votre adresse postale professionnelle et une adresse électronique
 un titre d’article

Les propositions sont à envoyer en fichier attaché (en format. doc ou. docx) à Laurent Gutierrez par courriel à l’adresse lgutierrez76ataol.com

Si vous souhaitez envoyer un article développé dès cette première échéance, nous le lirons avec la même attention.
L’intitulé du fichier sera nommé comme suit : Spirale68 votre nom.doc (ou. docx).
Les propositions retenues donneront lieu à une proposition d’article qui n’excèdera pas 30 000 signes (espaces compris), attendue pour le 1er septembre 2020. Elle sera rédigée en utilisant la feuille de style et en suivant strictement les options rédactionnelles spécifiques à la revue Spirale, notamment en ce qui concerne la bibliographie : http://spirale-edu-revue.fr/spip.php?article635
Elle sera soumise à un logiciel anti-plagiat avant le processus d’expertise.
Si des révisions devaient être nécessaires, la version définitive des articles et de la présentation devra être remise au plus tard début mai 2021.